Dans L'isolée, Margot racontait son histoire avec Pierre: l'histoire de Pierre et de Margot, c'était celle de deux êtres, très jeunes, trop fragiles, peut-être, traversés par une vérité: l'une de ces vérités premières dont l'enfance a connaissance et qu'on s'efforce, ensuite, d'oublier. L'une de ces vérités qui, si on leur est fidèle, vous éloignent du réel, ne vous laissent d'autre choix que la révolte et le combat. Dans L'isolement, Margot est seule, cette fois, vraiment. Elle raconte la vie sans Pierre, la vie sans rien: la vie en prison. Les rituels d'entrée, comme autant de viols et de dépouillements qui en même temps qu'ils vous soustraient au dehors vous privent de dedans, les psys et l'infirmerie, les règles et les carcans, et le corps qui se cabre, et l'esprit qui dévie. Mais aussi Aminata, l'amie, la magicienne qui, un temps, l'a protégée de tout cela, l'a arrachée à ses fantômes, l'a rapatriée sur la rive des vivants. L'isolement n'est pas un récit naturaliste sur la prison: c'est un chant, fredonné depuis la maison des morts et des demi-vivants, à la fois lucide et halluciné. Dans ce texte, écrit dans les interstices du premier, tramé des silences où s'abreuve la mémoire, des rêves et des cauchemars dont naissent les histoires, ne perce aucun dehors: de l'ailleurs, seulement.